Vivre l' art-thérapie

Des souvenirs de création.

 

Les ateliers de peinture dans le prolongement du geste de l'écriture engagent le corps, nous le savons. Enfant, debout couché, avec les mains, la peinture est le jeu. A l'école, la blouse est mise, le matériel sera à ranger. Entre les deux, le regard se concentre, la main cherche le geste, la couleur et la forme se dessine. Se concentrer et faire fi du regard du maitre, du camarade, ne pas faire pour faire du beau. J'ai aussi le souvenir d'une atmosphère musicale avant ou à la fin de l'atelier comme un signe de fin. Au fil du temps, les disciplines Arts plastiques, Danse, Ecriture viendront dans des champs spécifiés. Clairement repérables. Sport ou littérature, arts, les beaux, ou physique-chimie... l'élève se révèle et, parfois, son itinéraire est fléché très vite. Dans le meilleur des cas, il décide. L'expérience est là, s'oublie, entre en mémoire.

 

J'entends dans les ateliers d’écriture, les souvenirs qui s'écrivent, les regrets parfois des élans de l'enfance et aussi les renoncements : l'écriture ce n'est pas pour moi, peindre jamais ?

 

Je pense au corps, à mon corps. Pas facile de s'y confronter à chaque moment, ce corps, cette chaire à la mémoire profonde.

 

 

Quand j'ai rencontré Cécile Orsoni, peintre, art-thérapeute et psychanalyste, au sein d'un groupe de travail, j'ai pris connaissance de sa démarche de soin par l'expression picturale. Plutôt que de l'expliquer longuement. Nous, le groupe de travail, nous nous sommes engagés avec la peinture, l'écriture puis la parole a pris place. le corps est engagé par l'expérience créative, l' éprouvé est fondamental . Aucune expérience n'est requise pour prendre la peinture à bras le corps, l'étendre dans tous les sens.

 

J'y suis allée confiante. J'ai retrouvé la main de l'enfant, se salir, en mettre par tout.

 

Aucun résultat n'était attendu.

 

L'étape suivante consiste à parler de sa composition, sa création devant les quelques personnes du groupe de l'atelier. Confiance, confidentialité et suspension du jugement sont les conditions incontournables respectées. Nous étions quatre engagés, chaque membre du groupe a raconté sa création, ses choix, son expérience. Cécile, nous posait des questions parfois, nous invitait à approfondir notre propos. Emue, retenue, j'ai dit très brièvement mon émotion et l'incompréhension de cette peinture que j'avais composé. C'était une expérimentation d'un dispositif qui a donné lieu par la suite  à l'écriture et à la danse.

 

J'ai retenu la part et la place du corps qui s'expriment en deçà et au-delà de la maitrise que je peux avoir des mots, et même des gestes apparemment libres.

 

Cette sensibilisation aux sens et aux gestes, j'aime ce mot, qui dessinent, créent. La part d'inconnue et d'innocence relative met de côté le déjà connu. La parole découvre une part du monde qui apparaît. L'éprouvé de l'enfant ajusté à une parole qui cherche, tente de dire le passage à l'espace d'expression s'est réactivé. Il a modifié le regard que je portais sur l'expérience de peindre, de jouer, et de dire par le mouvement un déplacement que j'ignorais. J'ai osé davantage questionner l'énigme de l'attachement ou plutôt l'impossible pensée du lien durable qui m'anime. Sans rien n'en savoir d'avance, le lien et l'absence de lien transparaissait dans les formes et aussi par la parole qui m'est venue. Ce n'était que le début non seulement du travail que j'ai investi au sein de notre groupe de recherche et aussi de mon travail d'analysant. Les attaches, thème si simple, classique même, c'est le mien qui se présente à moi de façon nouvelle. Libre.

 

 

 

Marie Haloux, Espace analytique, atelier d'écriture, analyses de pratiques. Octobre 2018

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